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Mourir comme un chien abandonné à l'hôpital?

Mourir comme un chien abandonné à l’hôpital en 2020?

 

 

 

Des psychologues citées ci-dessous le disent dans une tribune de Libération. Elles se font le relai de leur écoute des vécus traumatiques des patients et des équipes soignantes. C'est ce qu'elles ont recueilli dans leur pratique hospitalière en cette douloureuse période de Covid-19 et des mesures sanitaires d’isolation contre la propagation pandémique du virus qu'elle entraîne.

 

 

Je rappelle brièvement que l'écoute clinique psychologique de la souffrance et des vécus traumatiques, c'est l'ouverture à un possible long travail de pensée qui opère pas à pas des liens et construit des ponts, avec les maux mis en mots adressés au long des séances. Au fil des mots et de la trame tissée, là où il y avait le débordement émotionnel douloureux, indicible ou inhibiteur, des blessures béantes actives et des trous (matismes) mortifères, des cicatrisations et des reconstructions résilientes adviennent.

 

« Les privations ou restrictions de visites ont des conséquences sérieuses : santé psychique des proches mises à mal, isolement et vécus dépressifs, sentiment d’être en prison, voire syndrome de glissement pour les patients hospitalisés. Sentiment de maltraitance et culpabilité pour les soignants. Elles engendrent en cascade des problèmes de santé publique à court et long terme et font résonner pour tout un chacun, grand public et personnel hospitalier, l’une des plus grandes peurs : celle de ne pouvoir être entouré par ses proches au moment de la fin. Nous alertons sur les conséquences dramatiques déjà observables chez toutes les personnes concernées. » (1[1])

 

C’est en effet un des pires cauchemars que celui d’être arraché aux siens et de penser dans une angoisse extrême de risquer de mourir tout seul, loin de chez soi et des siens, isolé des autres humains, en milieu hospitalier saturé de cas et hyper concentré et mobilisé autour du Covid.

 

Il ne fait pas bon souffrir par ailleurs, en ces temps de pandémie, d'une autre pathologie.

 

Sans parler du drame des EPAD qui font ce qu'ils peuvent, conscients que les vieux n’ont parfois que la visite des leurs pour les rattacher à la vie….

 

Et que dire des familles qui ne peuvent pas venir entretenir le reste de flamme de leurs aînés qu’elles se culpabilisent de laisser à l’abandon…

 

Et des petits enfants qui angoissent de risquer de faire mourir leurs grands-parents en désirant les voir…

 

On vit quand même une époque soi-disant moderne où l’importance du psychisme et de sa prise en compte psychologique, pourtant essentielle et au moins tout autant vitale que le médical somatique est encore trop souvent déniée ou reléguée au second plan.

 

Notre société trouve en effet bien plus noble et bien plus valorisé et valorisant de s'occuper médicalement du cœur comme morceau de viande irriguée que du cœur des Hommes sur le plan métaphorique psychologique. Question de choix et de hiérarchie des "valeurs".

 

Il est plus noble de mourir d'un infarctus du myocarde que d'une peine de cœur. Qu'importe d'ailleurs que l'une ait pu secrètement conduire à l'autre.

 

Dommage !

 

Un ami très proche depuis mon début de carrière a été hospitalisé en urgence jeudi dernier après un gros malaise initialement diagnostiqué dans le cadre d'un important dysfonctionnement rénal. Encore conscient et lucide à son entrée, puisqu'il a pu communiquer le n° de téléphone de son domicile, il n'a pas été visible par son épouse et son fils avant ... plusieurs jours, Ils ont obtenu un droit de visite, après qu'il a enfin pu passer un scanner. Mais il était déjà tombé en état comateux. Le scanner passé 4 jours après son entrée, révéla un AVC hémorragique massif…Il ne s’est hélas plus jamais "réveillé" et n'a plus eu l'occasion, depuis son départ en urgence de la maison, de revoir les siens ne serait-ce que pour se sentir entouré et leur dire au revoir. Il vient de mourir, une semaine après son entrée, dans cette isolation mentale de départ pour lui et dans la culpabilité pour sa famille.

 

Tes obsèques en musique avec tes enfants et petits enfants ont rendu l'émouvant hommage mérité au musicien, chef d'orchestre et transmetteur  passionné et passionnant que tu as été.

 

 

 

 Adieu l’ami ! 

 

 

 

 

                                                                                            Michel Berlin

 

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