Notes sur la perversion

 

Notes SUR LA PERVERSION

 

 

(Les formations de l'inconscient - Cartel du 25 juin 96)

 

 

          Bien qu'on ait dit que la perversion est le négatif de la névrose, la pulsion n'y est pas pour autant à ciel ouvert, dans une sorte de court-circuit débridé de l'instinct.

 

 

La perversion ne se situe, ni hors refoulement, ni hors-jeu et effets du signifiant.

 

 

          Il y a toujours quelque chose que le sujet ne veut pas reconnaître. Quelque chose qu'il méconnait pour des raisons d'articulation de la chaîne signifiante, avec ses mécanismes d'élision d'un signifiant tombé au rang de signifié pour un autre signifiant.

 

           Il y a du sujet dans la structure perverse et il n'y a pas forclusion du signifiant du Nom du Père.

 

 

           Lacan note aussi que le fantasme pervers ne s'énonce pas sans culpabilité. Ce n'est pas un acting.

 

           Mais s'il y est bel et bien le sujet y est néanmoins là en simple spectateur ou en exhibitionniste avec la complicité d'un autre regard d'ordre maternel, puisque, pour lui, le manque est dénié et mis dans le tiers Autre.

 

 

           Freud marque bien que la problématique de toute perversion est constituée à partir des avatars de l’œdipe et par rapport à la loi de castration. On note toutefois que c'est la dimension imaginaire qui est prévalente. Ce qui implique la valorisation de l'image, le maintien prévalent du rapport intersubjectif sur l'impasse de l'axe imaginaire coupant et barrant l'accès symbolique du sujet à sa vérité inconsciente et la satisfaction imaginaire du fantasme où le sujet consiste comme objet de l' Autre.

 

 

          Il y a prévalence du rapport métonymique du sujet avec un signifiant phallique ravalé au rang d'instrument de possible récupération d'une jouissance.

 

 

          Mais la parole du sujet reste possible. Celle qui dit métaphoriquement le manque qui la cause. Celle que le sujet a à reconnaître comme sienne dans ce qui lui revient du lieu de l' Autre sous forme de message inversé.. Mais il y faut l'artifice du transfert et de l'analyse pour en permettre le passage-

 

 

En effet le pervers reste analysable.

 

Sa résolution Œdipienne a raté mais peut se remanier. Elle reste-dans le désaveu de la loi de castration du père et comme défi à cette loi sous et pour la complicité du regard de la mère.

 

 

           Face au risque d'impasse imaginaire d'une mère toute, puis de la béance ouverte pour le sujet par la prise en compte de la castration de cette mère qui serait dès lors écornée ce qui en menacerait en retour le sujet, le drame du pervers est de n'avoir pas pu être amené par cette mère à se référer au père en tant qu'agent de la castration et support de la loi.

          C'est donc à la loi de la mère qu'il reste assujetti en un désaveu de la loi du père.

 

          Pour lui, il n'y a pas prise en compte et acceptation de la castration de la mère. Sa mère est pour lui non inductrice, non médiatrice d'un au-delà d'elle, le phallus du père en perspective promouvante, comme possible idéal du moi de l'enfant mâle et comme loi d'orientation perçue de son désir pour elle.

          Bref ça rate pour le pervers au niveau de la métaphorisation de son désir qui le sortirait de l'impasse imaginaire et de l'assujettissement maternel.

          En effet, du fait de cette métaphorisation paternelle ratée, en tant que désirant, le pervers n'est pas, comme le névrosé, dans un rapport métaphorique au manque (le phallus symbolique). Il est dans un rapport de désir métonymique au manque comme par exemple dans le fétichisme, ou dans l'homosexualité où l'objet est un substitut de son identification phallique non traversée, non dépassée, non castrée.

 

          Il n'y a pas forclusion du signifiant du NDP. Le désaveu même de la loi du père suppose de s'y référer quand même. Mais la complicité maternelle qui reconnait valeur de loi au désir du pervers, désir du désir de la mère puis de sa métonymie valant phallus, fixe le pervers dans son rôle d'objet et de sujet de plaisir ainsi par elle reconnu et paré ainsi, en désaveu de toute loi du père au-delà. Ils ne manquent de rien ainsi. Pour le pervers c'est son désir qui est la loi. C'est lui qu'il exhibe devant l'Autre pour le captiver et partager avec lui le démenti de sa castration.

          Ce qui est contesté et désavoué dans ce spectacle censé être captivant, c'est le droit du père à légiférer, c'est sa place de représentant phallique vers qui la mère orienterait son désir, mettant le pervers en écart , confronté à la castration.

 

           Pour J.A. Miller (clinique ironique), dans la névrose, le désir est une défense contre la jouissance. Le symbolique pare d'un Autre qui serait du réel non séparé de la jouissance comme dans la psychose, qui est cette structure clinique où l'objet n'est pas perdu. Dans la psychose il n'y a pas métaphore paternelle, le désir de la mère n'est pas symbolisé. C'est pour ça qu'il est dans le réel comme volonté de jouissance sans limite Dans la perversion la défense est contre la castration et consiste dans le démenti de celle-ci. « Elle prend la forme de la fétichisation de la jouissance. »

 

 

 

            Le névrosé avoue son manque à être. Il cherche à en faire la cause du désir de l'Autre où il l'a placé sous forme d'objet perdu (a). Dès lors, et c'est le fondement de tout discours comme lien social, il lui adresse sa demande à cet Autre. Par sa demande, il fait ainsi consister l'Autre auquel il croit, par exemple en l'aimant comme dans le transfert, pour se parer du réel au prix de ne pas reconnaître et assumer son désir. Il cherche à faire de son manque le soutien de l'Autre qu'il fait exister et consister et à qui il demande l'objet perdu (a) qu'il a placé en lui au titre de sujet supposé savoir, au prix de s'inhiber et de s'effacer devant lui.

 

 

 

            Pas moins que le névrosé le pervers est séparé de la jouissance par la fonction de l'Autre. Comme le névrosé il le fait exister parce qu'il parle. Mais là où le névrosé l'avoue, le pervers le dément. A l'inverse du névrosé, le pervers dément son manque qu'il place dans l'Autre de la relation intersubjective dont il se fait l'objet (a) pour l'angoisser à sa place.

 

           Ayant fait basculer son manque dans l'Autre, la demande du pervers n'a pas fonction d'objet d'un fantasme, mais bien forme d'impératif, d'ordre, de commandement.

 

 

           Ce terme de démenti prend bien valeur de l'envers de l'aveu douloureux du névrosé.  Et c'est au regard du rapport inversé à la castration que la névrose est l'envers de la perversion

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